Dans Birmanie un billet écrit par Christine le 17 juin 2014
Cela fait quelque temps déjà que je ne vous ai plus parlé de la Birmanie. Je n’ai pas encore épuisé tous les sujets de ce fantastique voyage effectué à la fin de l’année dernière et aujourd’hui, c’est dans une région très particulière que je vous emmène. Mon Romand n’avait pas envie d’y aller, mais alors pas du tout. Situé à proximité immédiate des frontières chinoise, laosienne et thaïlandaise et largement associé (à juste titre) au trafic de l’opium, le Triangle d’or avait de quoi rebuter mon très prudent compagnon. Du reste, les touristes sont nettement moins nombreux dans cette partie de la Birmanie que sur les autres sites que nous avons visités. La perspective de découvrir cette terre riche et passionnante, où vivent de nombreuses tribus montagnardes, m’a toutefois rendue têtue. J’ai insisté, beaucoup, et promis que l’on y passerait pas plus de deux jours au lieu des quatre prévus initialement. Et nous voila débarquant à Kengtung, un après-midi de fin de mousson. En avion forcément car pour l’heure, la route est encore fermée aux étrangers. L’arrivée à l’aéroport, plutôt rudimentaire, donne le ton. Il fait frais, nettement plus qu’à Yangon ou Mandalay. C’est qu’ici nous sommes à 780 m. d’altitude. Autre surprise, l’endroit est truffé de militaires à la mine peu engageante. Le contrôle des passeports est minutieux. Très vite on se sent dans un autre univers. Comme pour le reste du voyage, San San notre guide nous accompagne mais à Kengtung, Ah Gar, qui maîtrise les dialectes locaux, se joindra à nous. Curieux personnage qui jongle avec l’anglais et nous décontenance par son humour pince sans rire que nous avons de la peine à décoder au début.Le trafic d’opium, les nombreux conflits ethniques et l’accès difficile de la ville expliquent son ouverture tardive aux étrangers. Située au bord d’un lac et entourée de trois collines dont l’une coiffée d’un grand Bouddha debout, elle n’est pas dénuée de charme. Mais s’il subsiste quelques demeures coloniales plutôt défraîchies, les infrastructures sont rudimentaires et l’offre hôtelière est très restreinte. Autant le dire tout de suite, il n’y a pas vraiment d’hôtel de qualité. Avec ses barreaux aux fenêtres, le nôtre tient davantage de la prison soviétique que d’une résidence pour touristes. Les chambres sont propres mais l’ameublement est plus que basique et les draps tout déchirés. Et c’est paraît-il le plus récent et le meilleur de la ville! Dans cette partie de la Birmanie, plus qu’ailleurs encore, les coupures de courant sont très fréquentes et durent parfois longtemps. Notre guide, très remontée contre les Chinois, nous explique qu’un barrage est actuellement en construction sur le territoire birman mais que toute l’électricité produite sera destinée à son puissant voisin
L’intérêt essentiel de Kengtung est d’être le point de départ de nombreuses excursions dans les collines environnantes qui abritent des ethnies dont le mode de vie semble n’avoir pas changé depuis des siècles. Seule contrainte, quelle que soit la destination choisie, il faut impérativement revenir dormir à Kengtung. Avant de partir dans les villages enn et akha (qui feront l’objet d’un prochain billet), nous faisons un petit crochet par le marché, histoire d’acheter de quoi nous restaurer durant la journée et d’acquérir des médicaments et autres cadeaux à offrir aux populations que nous visiterons.
On y retrouve toutes les ethnies de la région venues vendre, acheter ou troquer artisanat, quincaillerie, outils, épices et produits frais. Le lieu est immense, organisé en quartiers selon les produits vendus. Celui des fruits et légumes est une véritable explosion de couleurs et de senteurs parfumées. L’offre est riche et variée. On s’étonne de ne pouvoir identifier que quelques légumes. La plupart nous sont totalement inconnus.
La pluie se remet à tomber. Nous nous fuyons les stands à ciel ouvert pour nous réfugier dans ceux abrités par de sommaires baraquements. L’ambiance est toute différente. Alors qu’habituellement j’adore déambuler parmi les étals, j’ai soudain un haut le coeur. Après les délicates senteurs fruitées et épicées, d’âcres et indescriptibles odeurs de chair bouillie et de sang viennent désagréablement chatouiller mes narines.
La vue de tant d’hémoglobine, ces carcasses puantes et les mouches ne m’incitent pas à traînasser. J’accélère le pas.
Mais un peu plus loin, à un stand de fabrication de chair à saucisse, une ravissante fillette chinoise retient mon attention. Elle improvise devant nous un numéro de séduction à faire pâlir de jalousie Marylin Monroe. La star c’est elle!
Le temps demeure maussade. Après la poissonnerie et la boucherie, toujours à la recherche d’un casse-croûte à emporter, nous pataugeons jusqu’ au « département » volailles.
Et là, j’avoue que mon petit coeur tout mou d’occidentale s’est serré à la vue de toutes ces poules vivantes attendant, l’air totalement abattu, que le couteau fasse son oeuvre.
L’homme à la chemise mauve a âprement négocié ce pauvre coq qui ne se fait guère d’illusion sur le sort qui l’attend…
Bref, la visite fut intéressante mais ne m’a pas mise en appétit. Autant vous dire que pour le pique-nique de la journée, je me suis rabattue sur un plat de riz … végétarien!
Bel article! d’excellentes photos. je trouve que prendre des photos dans un marché est difficile, tu réussi superbement l’exercice. J’aime tout particulièrement celle avec les carcasses de poissons (impressionnante) et la suivante avec les couteaux.
Je comprends ton envie végétarienne pour le déjeuner. Ce voyage a du être passionnant!
Dans les marchés, en principe j’utilise mon petit lumix GX1 muni d’un objectif 20mm très lumineux (f1.7). Il a l’avantage d’être discret et de moins agresser les gens qu’un objectif de réflex. J’ai ainsi pu m’approcher sans problème des personnes et gérer les mauvaise conditions de luminosité. Merci de ton passage Françoise et belle fin de semaine.
excellente série toujours aussi bien accompagnée par le texte ; j’aime beaucoup le contraste entre l’étale de têtes de poisson et la photo avec la fillette
J’ai bien pensé que cette photo de têtes de poissons pourrait t’intéresser Ronan. Elle me fait un peu penser à ta série sur l’art de faire boucherie en campagne. Un grand merci pour ton comm. je suis vraiment très contente que tu apprécies également le texte.
En lisant tes propos, on se rend compte que le voyageur peut être parfois confronté à des situations déstabilisantes, parce que inhabituelles, surtout lorsque l’on part à la découverte d’un pays aussi différent (coutumes). Les images dans les stands abrités sont vraiment belles, je trouve que le lieu (plus sombre) met bien en valeur les situations.
Encore bravo pour cette belle série :-))
Nous avons visité beaucoup de marchés en Birmanie (je préfère m’attarder dans des lieux grouillants de vie que dans des musées d’état tout figés). De tous ceux que nous avons vus, celui de Kengtung (appelée également Kyaing Tong) était le plus impressionant car à mon avis le plus authentique.. Le temps maussade a ajouté encore à l’ambiance très particulière qui y régnait. Je craignais un peu pour la qualité de mes photos car mon hybride ne supporte pas très bien les hautes sensibilités mais heureusement je n’ai pas eu besoin d’aller au-delà de 400 iso même sous les abris, en ouvrant un max. parfois ( pour les couteaux et la petite fille). Merci beaucoup Marie 🙂 et bon w-e (je crois qu’en France, vous faites le pont également…)
Ben voilà, maintenant je suis impatiente de connaître la suite de cette partie du voyage dans le triangle d’Or!!!
Concernant les photos, j’aime ton traitement qui atténue la vivacité des couleurs. Ce sont les deux, poissons et couteaux, qui me paraissent les plus percutantes!!!
Je trouve que les bananes prennent un peu trop d’espace par rapport au personnage.
Vivement la suite!
Bonne fin de journée Christine
Cette excursion dans les collines du Triangle d’or fut un moment fort de notre voyage. Je vous en parle très bientôt. J’essaie de varier un peu les sujets, pour ne pas trop vous bassiner avec la Birmanie;-) S’agissant du traitement des photos, pour une fois j’ai utilisé un preset LR. Je suis vraiment contente que d’une manière générale vous appréciez les photos des poissons décapités et des couteaux car j’ai tourné un petit moment autour de mon sujet et ai fait plusieurs prises pour trouver le meilleur point de vue. J’ai du reste réussi à tacher de sang ma veste en me penchant un peu trop sur l’étal où étaient posés les couteaux… Très belle fin de semaine à toi aussi Chrys et à bientôt
Voilà « une mise en bouche » de ton périple un peu particulière, les photos sont belles et maintenant j’ai hâte de découvrir les tribus montagnardes. Je ne comprends pas pourquoi tu n’as pas agrémenté ton riz blanc avec les boulettes de viande et le bouillon 😉 J’aime la photo de la fillette chinoise en tunique locale et son regard charmeur.
Avec « mise en bouche », tu as vraiment trouvé le terme adéquat Isa 😉 A priori, les boulettes de viande semblent appétissantes mais je t’assure que l’odeur de chair bouillie au dessus de la casserole était particulièrement écoeurante (et je ne suis pas douillette avec la nourriture, je mange de tout même des abats…). Quant à cette gamine, elle était absolument adorable, une véritable petite poupée pas farouche pour deux sous. Je l’aurais bien calinée toute la matinée. La suite du périple dans les terres de l’opium arrive tout soudain. A bientôt
Voilà ce que j’appelle voyager ! Merci de nous en faire profiter !
Je suis ravie de te lire ici Bruno. Merci de ton comm.
On m’a dit grand bien de la Birmanie. Tes images soignées font idéalement voyager à distance, avec toujours l’humain au centre. On en redemande ! 😉
En photo, l’humain est un des mes sujets préférés. Et je dois dire qu’en Birmanie, j’ai été très gâtée. Les gens ne sont pas farouches devant l’objectif et avec un minimum de courtoisie, il y a possibilité de prendre de très beaux clichés. Belle fin de semaine Aurore.
Bonjour très chère cop’s !
Tu nous régales avec ton voyage en Birmanie et peut-être à cause de mon côté « aventurière de l’extrême », je crois que c’est l’article qui me touche le plus par l’authenticité des situations que tu nous retransmets, plus loin des lieux touristiques « convenus », mais certainement plus proche de la « vie réelle » des Birmans. Il faudra vraiment que tu penses réaliser un livre !!
Tu as tout à fait raison, ma très chère baroudeuse, c’est la partie la plus « authentique » de notre voyage, la suite de mon récit te le montreras encore davantage. Et pour le livre, je m’apprête à m’y atteler durant l’été, dès que j’aurai un peu plus de temps car j’ai vraiment envie de garder un souvenir « matériel » de ce très beau voyage. A très bientôt Laurence.
Je prends toujours autant de plaisirs à lire tes billets de voyage et ce billet est sans doute celui qui m’a le plus touchée (avec celui des bâteliers au petit matin). Je suis impatiente de lire la suite !!!
Ton enthousiasme me faire vraiment très plaisir Laurence. La suite tout soudain. Il y aura de la boue, de l’humain et beaucoup d’échange à la clé de ce prochain billet;-) Bon w-e!
Je crois aussi que le riz végétarien, c’est BIEN ! Et Bouddha surveille derrière ‘l’épaule de chacun. Ton billet est fort intéressant, et que dire des photos ? Merci.
Le riz végétarien, c’est bien mais c’est surtout très BON 😉 Je ne consacrerai pas de billet à la gastronomie birmane mais elle est très goûteuse et savoureuse. Contrairement à certaines idées reçues, elle n’est pas très épicée et surtout comporte de très nombreux légumes, dont comme je l’ai dit ici, certains nous sont totalement inconnus. A bientôt AniLouve et très belle fin de semaine à toi.
Surtout n’épuise pas tes sujets birmans trop vite, laisse nous encore dans le plaisir de la contemplation ! 🙂
Rassure-toi, il me reste encore un ou deux sujets:-)
En voyage aussi je suis souvent végétarienne, surtout après être passée sur les marchés. 🙂
Excellente série avec un petit plus pour celle des bananes, des poissons et des couteaux.
Les saveurs sont tellement bonnes qu’il n’est pas nécessaire d’ajouter de la viande. Je suis contente que ces vues de détails te plaisent.
C’est tout un dépaysement que tu nous proposes là avec ce magnifique reportage. Un pays que je ne connais pas et que je découvre grâce à toi.
J’espère te donner le goût de le découvrir un jour 😉
[…] beau reportage en Birmanie chez Christine Keller: pour voyager sans quitter son canapé Et en prime, une jolie série de photo macro pleine de […]
Vous n’épuiserez jamais tous les sujets d’un voyage aussi fantastique !
Le triangle d’or…nous y étions du côté thaïlandais, mais sur le bateau nous avons longé les côtes birmane et laotienne, avec plein de casinos. Mais c’est dans les marchés que l’on trouve la vraie vie, même si la pluie ne rend les produits pas très appétissants. Nous attendons la suite…
[…] Le Triangle d’or, Kengtung et son marché […]
Comme tu le dis, la star de ces photos c’est certainement la fillette, mais la star de ce reportage ce sont tes photos ( fort bien accompagnées de tes mots )..
Merci de me faire revisiter ce pays où je suis passé en novembre dernier, J’ai posté sur youtube quelques vidéos, notamment le lac Inlé. Superbe
Bonjour, je reviens là dessus. J’aime beaucoup la façon que tu as de photographier des gens. On te sent proche d’eux. Je veux dire que tu ne les « prends » pas comme des animaux sauvages au gros télé. La photo de la vendeuse de poisson. spectaculaire.
Lors de mon circuit 2 semaines, j’ai fait trek à Kengtung. et ai eu la chance de vivre la vie des ethnies ici. C’est une expérience magnifique pour moi